Performance des processus et pilotage des activités dans le groupe Laser

Dans le cadre d’un projet d’optimisation de sa performance, le groupe LaSer a modélisé l’ensemble de ses processus pour ses activités de crédit. Avec une cartographie complète et l’élaboration d’un référentiel unique.

Dans le groupe LaSer, spécialiste des services marketing et financiers, filiale du groupe Galeries Lafayette et de BNP Paribas Personal Finance, la réflexion sur le pilotage des processus a été entamée en 2004. Elle a conduit dans un premier temps à une refonte complète des systèmes d’information.

En 2008, une importante réorganisation a nécessité de retravailler le référentiel de l’ensemble des processus métiers, support et pilotage, afin de les mettre à jour. « Une réponse à des exigences réglementaires très strictes (Bâle II) nous obligeait également à documenter nos activités et à optimiser le pilotage de nos risques et, pour sa part, la direction générale avait la volonté d’assurer un contrôle permanent de nos opérations », précise Jean Arhan, directeur des programmes du groupe LaSer. à cela s’ajoutaient des exigences classiques de lancement de nouveaux produits et d’amélioration de la performance économique globale de l’organisation.

Le périmètre du projet concerne l’activité crédit du groupe LaSer. Il implique aujourd’hui 70 correspondants processus en France et à l’international, et concerne quelques centaines d’utilisateurs, managers, chefs de projets, responsables du contrôle.

Il est fondé sur la mise en place d’un référentiel unique de processus de l’entreprise, pour la description de l’activité et des services rendus aux clients. Cette base documentaire de référence est ensuite mise au service des différentes initiatives d’amélioration : pilotage de l’activité de crédit international, Lean Six Sigma, scoring, gestion des risques, urbanisation du système d’information… Dans le contexte d’une démarche processus, le rôle de la DSI est évidemment essentiel, notamment pour identifier et décrire les activités et le système d’information correspondant : « La DSI a été et reste notre meilleur soutien », assure Jean Arhan.

« L’objectif essentiel d’un référentiel unique est d’éviter la désynchronisation entre la réalité et la représentation de cette réalité. Il est fondamental que le référentiel de processus représente en permanence la vision groupe des chaînes de valeur de l’entreprise », précise Jean Arhan.

Préalable à la construction du référentiel : cartographier les processus de façon homogène et cohérente. Pour la cartographie et le pilotage des processus, LaSer a utilisé les modules GRC (Governance, Risk & Compliance) de l’éditeur Mega, en complément de modules de cartographie de l’organisation. « Sur cette description se sont greffés tous les éléments constitutifs de l’analyse de la performance des processus », explique ève Biensan, responsable du pôle processus de LaSer.

Plus précisément, l’approche comprend plusieurs volets :

  • Identifier : c’est-à-dire formaliser le cadre représentatif de l’activité de l’entreprise sous forme de chaîne de valeur ;
  • Décrire : c’est-à-dire séquencer les activités caractérisant le service rendu, ce qui, insiste ève Biensan, reste « plus facile à dire qu’à faire, dans la mesure où le processus doit constituer une chaîne de valeur sans rupture » ;
  • Maintenir : c’est-à-dire conserver en permanence un socle de connaissances du métier à jour et réutilisable : « Nous avons mis en place une structure dédiée pour maintenir le référentiel et la qualité de la description », précise Eve Biensan ;
  • Enrichir : c’est-à-dire intégrer les outils et moyens pour piloter et contrôler l’activité ;
  • Enfin, optimiser : c’est-à-dire développer et mettre en œuvre les améliorations souhaitées sur la base des descriptions.

Le groupe LaSer a mis en œuvre une démarche classique de pilotage de la performance en six phases (voir tableau page 2). La première phase de déclinaison de la stratégie et des objectifs de performance s’appuie sur une approche de type Balanced Scorecard.

« Cette approche permet de piloter la déclinaison opérationnelle de la stratégie en suivant les effets sur le fonctionnement de l’entreprise, en prenant en compte les aspects clés de performance et en mettant en évidence les relations de cause à effet entre performance opérationnelle et résultat stratégique, dans une perspective d’optimisation de la performance des processus », détaille Jean Arhan.

L’approche processus est ainsi étroitement liée à la performance, pour au moins trois raisons : elle facilite la vigilance réglementaire, elle optimise les modes de fonctionnement (avec une orientation client) et elle renforce la coopération entre les différentes unités de travail. Autrement dit, « le processus organise la relation entre performance opérationnelle et valeur client, entre activités et prestations clients, entre compétences internes et attentes clients », résume Jean Arhan.

Deuxième étape : identifier et décrire les activités/processus et le système d’information correspondant. Il s’agit, d’une part, d’identifier les attentes des clients, les processus et de décrire les activités.

Chez LaSer, on trouve ainsi 27 familles de processus (par exemple « cartes », « comptes clients », « recouvrement », « relations avec les partenaires »…), 172 processus métiers (par exemple « gérer les demandes de documents contractuels », « souscrire un contrat carte », « gérer les produits d’assurance »…) et des processus élémentaires (par exemple : « traiter une réclamation client », « transformer une carte de fidélité en carte privative »…).

La description des processus existants identifie les services rendus essentiels, ainsi que les points de contrôle et les dysfonctionnements significatifs. « Disposer d’une base unique, avec une granularité homogène, était un point fondamental, précise Jean Arhan, sinon, on ne sait pas comment faire ! »

Outre ce référentiel unique, les objectifs de la démarche sont de garantir la pérennité (prendre en compte tous les changements), d’assurer le déploiement du dispositif du contrôle interne, de préparer l’automatisation des processus et « d’améliorer le service rendu à nos clients, filiales, partenaires et actionnaires en identifiant les gisements de progrès sur les processus-clés », ajoute Jean Arhan.

La constitution du référentiel s’effectue selon trois grands principes. Le premier consiste à établir les invariants métiers par service rendu afin d’avoir « une vision du processus exportable à d’autres entités », souligne Jean Arhan. Deuxième principe : historiser les choix de découpage et de constitution du référentiel métier.

« La contextualisation des processus permet de créer une vision globale du groupe avec les spécificités de traitement en fonction de la filiale (France ou international), du partenaire et du service rendu, de comparer l’ensemble des processus clés du groupe pour en extraire les best practices et analyser chaque processus pour gagner en efficacité (choix de nouveaux outils, sous-traitance d’activités…), et aussi de couvrir l’ensemble des coûts de chaque activité », détaille Jean Arhan. Troisième principe : garantir la traçabilité des métiers dans le référentiel.

« Cette transversalité des processus implique que plusieurs acteurs relevant d’entités différentes soient associés dans le cadre de son traitement, explique Jean Arhan. En effet, certains produits sont complètement intégrés et tributaires d’autres produits, c’est le cas par exemple de la souscription d’une assurance emprunteur. Cela paraît simple, mais c’est relativement difficile de convaincre les collaborateurs qu’ils font tous partie intégrante d’une chaîne de valeur avec un fournisseur à un bout et un client à l’autre. »

Un processus se formalise de deux manières et comporte des niveaux plus ou moins fins de description : d’une part, une vision organisée, d’autre part, une vision fonctionnelle. La première précise les modalités par lesquelles les traitements sont opérés dans l’organisation, « et la manière de le faire « dans la vraie vie » », précise Eve Biensan.

Cette vision organisée s’utilise lorsque l’organisation est bien identifiée et répond aux questions : « Qui fait quoi ? où ? quand ? comment ? » La vision fonctionnelle, elle, s’utilise en mode projet lorsque l’organisation n’est pas identifiée, et s’attache à décrire le processus de manière générique. « L’activité représentée est modélisée comme un invariant métier, c’est-à-dire un mode de traitement applicable dans n’importe quel contexte », précise ève Biensan.
Outre ces identifications et descriptions des activités et processus, cette deuxième étape s’attache à associer les applicatifs système d’information et les activités. « La description des processus existants permet d’éclairer la démarche de reingeneering du système d’information, de développer de nouvelles fonctions et d’assurer le lien entre les applicatifs systèmes d’information et les activités, explique ève Biensan. On en déduit le schéma d’urbanisation du système d’information. »

La troisième étape concerne la rattachement des coûts aux activités, avec la méthode ABC (Activity Based Costing). Objectif : mettre en évidence les pistes d’optimisation financière, dans la mesure où l’on dispose d’un catalogue des coûts unitaires et d’une vue transversale des coûts complets (par processus, par produits, par canaux de distribution…). « L’analyse des coûts des activités (méthode ABC) est un moyen efficace d’identifier les pistes financières d’amélioration », assure Jean Arhan.

Quatrième étape : détecter les problèmes de performance des processus. Il s’agit ici d’analyser les causes de la sous-performance : pour quelles raisons l’objectif est-il difficile à atteindre ? Cette identification des problèmes conduit à un plan d’actions. L’analyse des indicateurs, la cinquième étape, consiste à définir, pour chaque levier de performance, d’une part, le ou les indicateurs les plus pertinents.

« Il faut répondre à deux questions essentielles : les indicateurs clés sont-ils en lien avec les attentes des partenaires ou des clients ? Les mesures collectées pour ces indicateurs permettent-ils d’illustrer la performance des processus ? », précise Jean Arhan. D’autre part, on définit le plan d’action à mettre en œuvre. Enfin, la sixième étape concerne l’évaluation des résultats obtenus, avec un système de suivi de la performance des processus.

Concrètement, chez LaSer, la mise en œuvre des actions et l’animation s’articule autour d’un réseau de soixante-dix correspondants (dont cinquante en France). « Pour maîtriser la description des processus, il faut s’adresser à ceux qui sont sur le terrain, souligne ève Biensan, qui anime ce réseau. Nous échangeons au quotidien pour nous assurer de la cohérence des processus et mettre à jour le référentiel, chaque correspondant travaille sur la même base. » LaSer a créé un intranet (baptisé Clic&Net) pour regrouper la description des processus.

La démarche d’amélioration continue des processus repose également sur la méthodologie Lean Six Sigma, avec cinq étapes (voir tableau page 4) : définir, mesurer, analyser, implémenter, contrôler. « L’approche Lean Six Sigma s’appuie sur la description des processus afin de faire ressortir ce qui ne va pas, de faire remonter les informations au management, souligne Jean Arhan.

Il ne s’agit toutefois pas de chercher des coupables, mais, au contraire, de fédérer les équipes autour de l’analyse des résultats pour favoriser l’appropriation des processus. » Cette approche constitue, selon Jean Arhan, « un cadre très normatif, mais nous en avons besoin si l’on veut atteindre, à court terme, des objectifs d’amélioration de la performance ».

 

Les six étapes d’une approche processus
Phases Actions Besoins
1 Décliner la stratégie et les objectifs de performance
2 Identifier et décrire les activités et le système d’information correspondant Connaître son activité pour se positionner
3 Rattacher le coût des activités consommatrices Connaître les coûts (analyse en temps et des équivalents-temps-plein) de chaque activité
4 Analyser, exploiter les indicateurs du suivi d’activités des processus Analyser ses activités en lien avec les coûts et les objectifs
5 Adapter les processus aux performances attendues en tenant compte des meilleures pratiques Améliorer la performance opérationnelle
6 Mesurer la performance en lien avec les objectifs stratégiques Évaluer les résultats obtenus
Source : Mega / LaSer.
Les huit étapes de la démarche d’amélioration de l’efficacité des processus
Cadrage des enjeux et des objectifs du projet par rapport au contexte 1 Validation de la description existante des processus
2 Analyse du processus décrit
3 Construction de scénario par processus
4 Validation des axes d’amélioration
Déploiement et mise en place de la solution 5 Adaptation de l’organisation projet
6 Mise en œuvre du plan d’action par processus
7 Suive des réalisations à court, moyen et long termes
8 Mises sous contrôle permanent
Source : Mega / Laser.
Les apports de l’approche Lean Six Sigma à l’amélioration des processus
Définir Mesurer Analyser Implémenter Contrôler
Enjeux  Quel est le problème ? Quelle capacité d’amélioration ?  Quand, où et comment agissent les défauts ? Quelles solutions et comment les mettre en œuvre ?  Comment piloter la récurrence ?
Optimisation des processus 1. Valider les enjeux et les opportunités
2. Collecter les attentes clients
3. Cadrer le projet
4. Définir le périmètre
1. Valider le système de mesure
2. Collecter les données
3. Décrire les processus
4. Analyser la performance de départ et cible
1. Analyser les processus et leurs défauts
2. Identifier les causes
3. Valider les causes réelles
4. Définir le processus cible
1. Créer et prioriser le plan d’action
2. évaluer les risques
3. Mettre en œuvre le plan d’action
4. Mesurer la nouvelle performance
1. évaluer les résultats
2. Mettre en place le plan de suivi
3. Mettre en place un dispositif d’amélioration continue
4. Définir une méthodologie groupe
Pilotage de la performance 1. Définir les objectifs
2. Créer l’arborescence d’indicateurs
3. Réaliser un benchmark
1. Analyser la précision du système de mesure
2. Réaliser une revue d’indicateurs
1. Réaliser une analyse statistique
2. Effectuer une revue d’arborescence d’indicateurs
3. Identifier les leviers de variabilité
1. Caractériser les éléments à mettre sous contrôle
2. Mesurer la performance
1. Définir les modes opératoires
2. Réaliser une revue de performance
3. Effectuer un contrôle continu
Conduite du changement 1. Sensibiliser, former
2. Informer
3. Analyser les parties prenantes
1. Fédérer
2. Impliquer les équipes
1. Analyser les résistances
2. Identifier les contraintes organisationnelles
1. Choisir et prioriser
2. Définir une stratégie d’influence
3. Fixer les objectifs et s’engager
1. Assurer l’atteinte des résultats
2. déployer
3. Communiquer
Source : LaSer.
Exemple de grille d’analyse systématique d’un problème
Actions Matière / principe
Identifier les problèmes Recensement complet et hiérarchisation
Choisir et poser le problème Buts, objectifs, priorités
Analyser la situation Recherche des informations
Diagnostiquer la situation Recherche des faits, causes et explications
Trouver des solutions Novatrices, réalistes, pratiques
Faire choisir et décider les actions Classement des solutions et choisir
Mettre en œuvre les plans d’action Expérimentation et application
Suivre les résultats Indicateurs, clignotants, contrôles
Standardiser les processus Uniformisation des procédures
Généraliser les processus Étude des possibilités d’extension
Source : Piloter par les processus, au-delà du Business Process Management, par Michel Raquin et Hughes Morley-Pegge, Editions Maxima, 2009, 479 pages

Les familles de processus chez LaSer

  1. Les processus de pilotage : ils permettent l’élaboration et l’application de la politique de l’entreprise, ainsi que le déploiement des objectifs dans l’organisation. Exemples : définir la stratégie commerciale et marketing, piloter et coordonner les accords et propositions, piloter les activités financières, définir et gérer les risques, piloter le système d’information…
  2. Les processus clients et opérationnels : ils contribuent à la réalisation du bien ou du service destiné au client final. Exemples : promouvoir l’offre, fournir des prestations de cartes bancaires, de financement, gérer un compte client, le recouvrement, la relation partenaire…
  3. Les processus support : ils apportent les ressources nécessaires au bon fonctionnement des processus client et de pilotage. Exemples : gérer les ressources humaines, fournir les services juridiques, exploiter le système d’information, assurer la communication…