Phygital : un état des lieux dans les entreprises françaises

Le cabinet de conseil Julhiet Sterwen a publié la septième édition de son baromètre Phygital Workplace, en collaboration avec l’Ifop. Cette étude analyse l’évolution de la perception des salariés en matière d’organisation, de management, d’outils et d’environnement de travail.

Premier constat : 74 % des managers pensent toujours vivre une révolution avec la transformation numérique, contre 51 % des salariés non-managers. Cette différence de perception s’illustre également dans ses conséquences, puisque 57% des salariés jugent son impact positif, sur l’entreprise comme sur eux-mêmes, contre 72 % chez les managers. « Il faudra un peu plus que des ateliers collaboratifs, un baby-foot ou une conciergerie pour convaincre certains de revenir au bureau », soulignent les auteurs de l’étude.

Le clivage entre managers et collaborateurs continue de se creuser. Si certains collaborateurs ont définitivement intégré l’hybridation dans leur mode de vie et s’y sont bien adaptés, ce n’est pas le cas de tout le monde. En effet, les managers sont plus nombreux à considérer que la transformation numérique renforce les liens au sein de l’équipe, que les salariés sans rôle managérial.

Il n’empêche : tout le monde ou presque (82%) s’accorde à dire que le travail hybride offre un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Ainsi, 13% des salariés apprécient même de pouvoir travailler à n’importe quelle heure et 40% trouvent ce système plus souple qu’avant

La confiance, clef de voûte du travail hybride

Parmi les facteurs clefs pour s’adapter au travail hybride, les plus fréquemment cités sont les outils informatiques mis à disposition (pour 34%), la confiance dans son manager (32 %, la responsabilisation et l’autonomie des collaborateurs (31%) et les solutions collaboratives (28%).

Toujours attentifs à l’équilibre vie privé/vie professionnelle, les salariés souhaitent bénéficier d’un équipement adéquat pour télétravailler dans les meilleures conditions. La moitié des répondants réclame une dotation de matériel (ordinateur portable, téléphone, tablette..) ou une compensation financière des frais générés par le télétravail. Quant aux managers, ils sont 28% à demander des formations adaptées à cette situation, désormais installée.

Le manque de relations interpersonnelles, le sentiment d’isolement ou la pauvreté des échanges à distance sont de moins en moins cités parmi les effets négatifs ressentis par les salariés en télétravail. En 2022, les collaborateurs ont désormais pris leurs marques avec le travail à distance : 20% disent même ne rencontrer aucune difficulté.

La possibilité de télétravailler, au moins partiellement, s’impose de plus en plus comme un élément déterminant pour tous les salariés, même si seulement d’entre eux se disent prêts à changer d’employeur pour pouvoir travailler à distance.

Seule ombre au tableau, et pas des moindres : la confiance. Si 87% des managers déclarent que l’adoption d’une organisation hybride favorise la confiance, la perception est assez différente chez les salariés n’occupant pas de fonction managériale, puisqu’ils ne sont plus que 60% à le penser. Notons par ailleurs que la moitié des managers estime que l’hybridation du travail rend plus complexe le management d’équipe, 76% d’entre eux s’orientent vers un rôle de « Manager coach.

« L’enjeu aujourd’hui, c’est le virage managérial à opérer pour saisir toutes les opportunités offertes par l’hybridation du travail. Posons-nous les bonnes questions : où sont les vraies priorités ? S’agit-il réellement de faire revenir tous les collaborateurs au bureau ? Ou de réinventer le contrat social qui lie collaborateurs, managers et organisation? La question est clairement posée », analyse Julien Lever, Managing Partner chez Julhiet Sterwen.

Télétravail : entre plébiscite et craintes

Les deux-tiers des salariés bénéficient désormais d’un accord de télétravail. Quand ils ne travaillent pas, le plus souvent, c’est en raison d’une impossibilité technique (89%). Leur métier ne peut s’effectuer en télétravail. Cette option n’en est pas une.

En 2023, qu’est-ce qui motive les salariés à se rendre physiquement dans les locaux de leur entreprise ? L’« obligation » répondent 48% d’entre eux. Mais, au-delà de cette directive, le contact social avec des collègues est particulièrement apprécié, notamment chez les managers (39%). Il faut reconnaitre qu’il est souvent nécessaire de retrouver son équipe pour la manager. Notons que 15% seulement des salariés pensent être plus efficaces au bureau qu’ailleurs. Pour éviter la réunionite aigue et les heures passées sur Teams, 67 % des managers ont défini des règles de fonctionnement encadrant les réunions à distance (caméra, durée,..)

Dans cette nouvelle édition du baromètre, la grande majorité des répondants (87%) s’accordent à dire que leur domicile – quelle que soit l’activité menée- offre un espace de travail pertinent en termes d’efficacité, de concentration et de créativité, aussi bien chez les managers que les autres salariés. Un bouleversement discutable.

Si l’hybridation possède son lot de bienfaits, il connait également certaines limites : la responsabilisation et l’autonomisation riment parfois avec une moins bonne détection des signaux faibles. Le risque de désengagement est toujours présent chez 60% managers, à fortiori ceux qui ne sont pas à l’aise avec le management hybride. Difficile d’évaluer l’engagement ou la véritable charge de travail des collaborateurs à distance, confessent 60% des managers.

Ce baromètre montre un écart non négligeable dans la perception du télétravail entre collaborateurs et managers. Pendant que les premiers attendent plus de flexibilité et de confiance, et donc de revenir au bureau à bon escient seulement. Les seconds semblent vouloir reconquérir le bureau, symbole de leur mode d’animation et supervision d’équipe.

Le management pose le sujet de la coopération de l’équipe en asynchrone. Si cela reste relativement aisé avec un petit groupe de personnes, grâce à un bon niveau d’interconnaissance, d’automatismes préalables et de sens de responsabilités réciproques. Le passage à l’échelle supérieure, vers du collaboratif, est une autre histoire, qui interroge encore beaucoup les organisations.

Usages digitaux : toujours plus de mobilité et de collaboratif

84% des salariés sont devenus des utilisateurs familiers des différents outils collaboratifs mis à leur disposition depuis plus d’un an. Et 59% des managers se déclarent satisfaits de leur usage. Si la formation et les tutoriels sont très appréciés des salariés, les initiatives sur les technologies émergentes sont encore timides. 78 % n’ont jamais entendu parler de réalité virtuelle ou augmentée, d’aide à la décision via l’intelligence artificielle, du métaverse ou encore des robots sociaux type Pepper.

Notons que les solutions de type portails intranet, logiciels bureautiques, outils de stockage et solutions de téléphonie & visioconférences sont les quatre outils / services les plus plébiscités par les salariés et managers.

L’organisation hybride du travail, mêlant présentiel et distanciel, concerne aujourd’hui une grande majorité de salariés dans les entreprises de 500 salariés ou plus. Le télétravail est une demande croissante des salariés, qu’ils soient managers ou pas. Pour autant, il n’est pas toujours synonyme de souplesse. Plus de 73% des salariés réclament plus de flexibilité dans ce domaine.

Par ailleurs, ce nouveau contexte oblige deux-tiers des managers à modifier leur posture managériale, notamment en accordant plus de confiance à leurs collaborateurs (87%), en veillant à les rendre plus autonomes (86%). Hélas, 60% seulement des collaborateurs sentent qu’on leur fait d’avantage confiance. Un écart de perception qui s’explique sans doute par une difficulté à modifier des habitudes managériales bien ancrées.

En effet si l’hybridation offre un meilleur équilibre vie privée / vie pro pour 82% des salariés et que les effets négatifs de l’éloignement s’estompent avec le temps, cette nouvelle forme d’organisation du travail demande une forme d’accompagnement spécifique. 65% des managers hybrides estiment difficile d’évaluer l’engagement des collaborateurs et plus de la moitié à les réunir, à fortiori si une partie seulement de l’équipe est en télétravail.

Malgré le déploiement d’outils performant, 60% des managers craignent un désengagement de leur équipe dû au travail hybride. Cette proportion monte à 76% chez les managers déclarant ne pas être à l’aise avec le management hybride.

Les collaborateurs, et plus encore les managers, soulignent de manière croissante l’importance des outils collaboratifs dans l’organisation du travail hybride, comme le démontrent l’utilisation croissante d’outils digitaux et de plateformes « selfcare » ainsi que l’émergence de nouvelles pratiques managériales liées. Les deux-tiers des salariés sont aujourd’hui équipés d’outils collaboratifs et la moitié les utilisent quotidiennement. Pour répondre aux nouveaux besoins liés au travail à distance, les entreprises continuent à accélérer la dotation d’outils de mobilité amorcée avec la crise sanitaire ordinateurs portables, tablettes, smartphones.

Pour en savoir plus : https://www.julhiet-sterwen.com/barometre-phygital-workplace-2023-lodyssee-de-lespace-de-travail