Productivité, mondialisation et technologies de l’information

La part de l’investissement des entreprises dans les technologies de l’information a doublé entre 1980 et 2000. L’Insee s’est intéressé, dans une livraison de sa revue économie & Statistique (n° 419-420, paru le 29 août 2009), aux liens entre la productivité et les technologies de l’information.

Les gains de productivité restent « sur le moyen long terme l’un des principaux vecteurs de développement d’une entreprise », assurent les économistes de l’Insee, qui ont livré les conclusions de leurs travaux (1) dans le dernier numéro de la revue économie & Statistique.

Ils se sont d’abord intéressés aux relations entre la production et le capital informatique. La part de l’investissement des entreprises françaises dans les technologies de l’information a doublé entre 1980 et 2000, passant de 6,8 % à 14,4 %. « Cette évolution couplée à la baisse continue des prix des TIC (15 % par an) révèle ainsi une augmentation considérable en volume », précisent les économistes. Ceux-ci estiment ainsi que l’élasticité de la production et du capital informatique s’établit à 0,9.

« Nous dégageons une estimation de la contribution du capital informatique à la croissance de la valeur ajoutée de l’ordre de 0,7 % », ajoutent les auteurs. Il est toutefois bien difficile de mesurer le capital informatique. L’Insee a procédé par analyse des déclarations fiscales des entreprises, mais qui ne mesurent que les immobilisations corporelles.

« La mesure des stocks, les cessions, les acquisitions de matériels informatiques ne peuvent qu’être des approximations », reconnaissent les économistes. Sans parler de la valeur du capital immatériel, véritable casse-tête pour les économistes et les comptables. Même partielles, les estimations ont toutefois le mérite de montrer un impact positif des technologies de l’information sur la production et la valeur ajoutée.

« La contribution du capital TIC à la croissance française, dans la seconde moitié des années 1990, était plus importante que celle de toutes les autres composantes de l’investissement », note l’Insee.

A un niveau plus macroéconomique, l’Insee met en exergue la forte dispersion de la productivité entre les entreprises (et même entre les différents établissements d’une même entreprise). L’une des explications avancées concerne le fait que les technologies de l’information auraient bénéficié, dans les années 1990 et 2000 davantage aux firmes les plus productives.

Hypothèse avancées par les économistes : ces entreprises seraient « plus aptes à profiter des vagues d’innovations technologiques, bénéficiant d’un niveau de qualification de leurs employés plus élevé, d’une meilleure capacité à se réorganiser et d’une veille technologique plus performante ». Autrement dit, précisent les économistes : « Les firmes appartenant à des sous-secteurs plus intensifs en TIC ont en moyenne une croissance de leur productivité significativement plus forte que les autres entreprises du secteur. »

Au niveau des pays, on retrouve de tels facteurs différenciateurs, notamment pour expliquer l’avance des états-Unis : « La capacité des états-Unis à investir dans les TIC, qui demeure supérieure à celle de la moyenne de l’Europe et du Japon, jointe à une avance probable en investissements immatériels, procurent un avantage en termes de croissance de la productivité du travail », concluent les économistes.

Les technologies de l’information n’expliquent toutefois pas toute l’évolution de la productivité du travail : « Si les gains de performances liés aux TIC expliquent une partie du regain de productivité observé aux états-Unis, ils ne peuvent expliquer le déclin relatif de la productivité en Europe » alors que les investissements en TIC sont en croissance. Les économistes expliquent ce paradoxe européen par l’intensité du contenu en emplois de la croissance, en baisse aux Etats-Unis, en hausse en Europe où les priorités vont à la réduction du chômage de masse. •

(1) « Distance à la frontière technologique, rigidités de marché, éducation et croissance », « élasticité de la production au capital informatique : estimations à l’aide de données d’entreprises », Convergence de la productivité des entreprises, mondialisation, technologies de l’information et concurrence ».

Poids des investissements immatériels dans le PIB
Pays Années Investissements immatériels Dont logiciels Investissement matériel en 2006
États-Unis  1988-2000 11,7 %  1,7 %  19,0 %
Royaume-Uni  2004  10,1 %  1,7 %  17,0 %
 Japon  2000-2002  8,3 %  1,8 %  23,0 %
 Pays-Bas  2004  8,3 %  n. d.  19,0 %
Finlande  2005  9,0 %  n. d.  19,0 %
Source : économie & Statistique, Insee