Quelles métrique pour les ressources humaines ?

Alors que la fonction Ressources humaines ne cesse d’évoluer, les processus de gestion des ressources humaines se complexifient. Le volume des données informatiques touchant au « capital humain » des entreprises n’échappe pas à l’inflation générale. Quels sont les indicateurs les plus pertinents à retenir ?

D’où le besoin d’outils d’aide à la décision, d’indicateurs et de tableaux de bord pour mieux exploiter ces données. Et de rationalisation face à l’explosion des données informatiques sur le « capital humain ».

Le management des ressources humaines recouvre pour le gestionnaire un ensemble d’activités. Nous en identifions six : le recrutement, la formation, la gestion des compétences et de la performance (passant par une gestion des évaluations), des rémunérations et de la masse salariale, des temps et activités, des carrières et de la mobilité.

Cette gestion s’avère d’autant plus complexe que les entreprises doivent, de plus en plus, faire face à des pressions, externes comme internes, de différents types.

Elles doivent prendre en compte les nouvelles réglementations, mettre en place la dimension internationale et la complexification des opérations dans le cadre d’un développement par croissance interne ou externe, être attentives à l’aspect démographique et à la fidélisation des talents, développer la responsabilité sociale de l’entreprise, rationaliser les coûts et les processus, et valoriser globalement la fonction GRH.

L’adaptation à ces pressions et contraintes passe généralement par une remise à plat des processus organisationnels et humains. Les entreprises se réorganisent, investissent ou font appel à des services extérieurs.

Elles doivent prendre en compte l’individualisation des salaires, des formations, etc. Dans ce contexte, il leur faut réinventer de nouvelles méthodes de travail et leurs salariés sont amenés à développer de nouvelles aptitudes.

L’organisation de la fonction RH elle-même évolue. De plus en plus d’entreprises (surtout les grands groupes) tendent à créer un front-office RH (ou centre de compétences RH). Ce front-office, interlocuteur des opérationnels, est missionné pour développer et optimiser les compétences en cohérence avec les besoins du business.

Ces dernières années ont vu évoluer considérablement le rôle du DRH, devenu un acteur de la stratégie de l’entreprise. On attend désormais davantage du service RH : à la fois une implication plus forte dans la stratégie de l’entreprise, des fonctions de communication, un partage des responsabilités. La fonction RH doit évoluer et se professionnaliser pour se poser en tant que partenaire stratégique du management.

Explosion des données informatiques sur le « capital humain »

En parallèle, le volume des données gérées par la DRH n’a cessé d’augmenter. Quelles soient quantitatives ou qualitatives, les données informatiques touchant au « capital humain » des entreprises n’échappent pas à l’inflation générale : leur volume ne cesse de croître dans le système d’information RH puisque la couverture fonctionnelle s’étend bien au-delà de la paie.

Les entreprises ne disposent pas toujours des outils pour analyser et faire parler ces données. D’où le besoin d’outils d’aide à la décision et d’indicateurs pour mieux exploiter ces données.

Surtout en période de conjoncture tendue, la fonction RH devra s’attacher à :

  • trouver comment diminuer les coûts : la fonction RH, face à une pression interne et externe croissante, est regardée de très près par les dirigeants ;
  • se doter de données fiables et cohérentes entre les différents pays : les données RH initialement séparées entre les pays devront désormais être partagées, intégrées mondialement ;
  • permettre que les relations sociales et le dialogue social ne se fassent pas à distance mais au niveau de chacun des pays ;
  • disposer d’un back-office de recrutement pour gérer les candidatures spontanées, trier les candidats, etc.
  • s’intégrer à des exigences de qualité, de valeur ajoutée de la fonction RH ;
  • se doter d’un portail de type self-service partagé qui permette de collaborer à distance et oblige à une cohérence du service entre les différentes divisions : cela suppose que les données nécessaires soient disponibles ;
  • proposer un accès à une partie de ces données du portail par le personnel (données qui lui sont propres, y compris données confidentielles à un salarié que lui seul peut visualiser : coordonnées bancaires, etc.). Le salarié peut renseigner son profil, visualiser les postes ouverts, ce qui peut encourager la mobilité et les évolutions de carrière. Ce portail sera mis à la disposition de managers opérationnels et plus seulement aux profils RH et contrôleurs de gestion.

Les problématiques soulevées à la mise en œuvre des outils de pilotage RH sont nombreuses, par exemple : comment concilier les différentes exigences de mise à disposition de l’information (avec le besoin d’analyses poussées pour les experts, le besoin d’indicateurs de pilotage pour le management et les responsables RH, le besoin d’accès aux données individuelles historisées pour le management) ?

Les exigences de qualité de la solution doivent porter sur quatre axes :

  • la pertinence de l’outil : l’offre doit être ciblée sur les enjeux stratégiques et sur des tableaux de bord produits efficaces ;
  • l’accessibilité de l’outil : orientation métier et facilité d’utilisation sont indissociables et nécessaires ;
  • la performance de l’outil : le temps de réponse et la disponibilité du système sont primordiaux ;
  • la fiabilité en termes de qualité des données et des indicateurs produits.

Enfin, si la fonction RH sait bien analyser ses besoins du moment, il faut savoir qu’elle est, en revanche, souvent moins mature, moins outillée pour anticiper et prévoir. Pour ce faire, l’entreprise devra mettre en place dans un second temps des outils de simulation et de prospection. Ils seront particulièrement utiles pour étudier l’évolution de la masse salariale et l’évolution des rémunérations.

Revenir aux principes de base de la prise de décision

Robert Kaplan et David Norton ont développé la théorie de la Balanced ScoreCard (tableau de bord prospectif, BSC), permettant de réconcilier les facteurs tangibles (indicateurs financiers) et les facteurs intangibles (capital humain, image de l’entreprise, capital client…) et d’en suivre les indicateurs clés (ou KPI, Key Performance Indicator).

En général, les KPI couvrent quatre grands domaines : la stratégie, les processus, la transformation (externe/interne, couplée aux évolutions structurelles : matérielles, technologiques, économiques/ environnementales, légales, sociologiques/culturelles…), et l’utilisation (mesure de la performance).

La mise en œuvre de l’approche Balanced ScoreCard exige un engagement fort en termes de management et d’organisation dans une entreprise.

Du point de vue des systèmes d’information, elle implique des outils décisionnels qui doivent dépasser le cadre étroit du tableau de bord financier ou commercial, et permettre de suivre, au jour le jour, la concrétisation de la stratégie au travers d’indicateurs pertinents.

De nombreuses autres analyses ont été développées. Par exemple, pour compléter les bilans et les comptes de résultats, certains parlent de la carte stratégique.

Il s’agit d’une synthèse graphique définissant les relations de cause à effet entre les éléments constituant la stratégie d’une entreprise ou de toute forme d’organisation prenant en compte : la mesure des résultats au regard du budget (axe financier), le client (axe client), les processus internes (axe interne), les compétences et la capacité d’innovation (axe apprentissage).

Appliquée aux métiers des ressources humaines, une analyse de type scorecard permet d’organiser les indicateurs en une vision stratégique articulée autour de quatre grandes perspectives : financière, clients, processus et organisation. Le périmètre de données concernées est alors beaucoup plus large.

De façon plus pragmatique, nous proposons de revenir aux comportements basiques de toute prise de décision : observer, analyser, comprendre le sens et agir.

Prenant en compte l’approche systémique, cette méthodologie s’applique à tout type de système. En fonction du périmètre concerné (toute la fonction RH ou une fonction spécifique comme la formation par exemple), les solutions informatiques seront plus ou moins élaborées et prendront plus ou moins de données en compte.

Certaines solutions spécialisées proposeront des analyses pour suivre le périmètre opérationnel qu’elles couvrent, d’autres, plus généralistes, proposeront des systèmes plus sophistiqués prenant en compte un plus grand nombre de données.

Cet article a été rédigé par Claire-Marie de Vulliod, analyste ressources humaines au CXP.


Exemples d’indicateurs

  • Suivi des effectifs.
  • Mesure du turnover.
  • Tracking des rémunérations.
  • Écart entre budget et réalisé.
  • Analyses salariales par rapport aux benchmark marché.
  • Qualité des process (temps moyen de réaction d’un manager, temps moyen de réponse d’un manager à un CV, …).
  • Suivi des coûts du recrutement.
  • Suivi des performances des prestataires externes.
  • Mesure a posteriori des résultats de la formation.
  • Positionnement de chaque salarié sur une synthèse graphique en fonction de sa performance, ses expériences et compétences.
  • Suivi des statistiques par filiale, région.

Les trois grandes étapes du processus décisionnel

étape 1 : extraire, transformer, alimenter
L’objectif est de récupérer les données à partir desquelles les indicateurs voulus seront produits. Les outils d’ETL (Extract Transform and Load Tools ou outils d’alimentation de données en français), connectés aux différentes applications se chargent de récupérer ces données, de les nettoyer, de les transformer pour les adapter aux besoins des utilisateurs à des fins de prise de décision et de les centraliser dans une base de données dédiée. Celles-ci doivent être structurées au sein de l’entrepôt de données (Data warehouse général ou datamarts spécialisés). Ce prétraitement doit permettre d’accéder plus facilement aux données. Le traitement, plus ou moins complexe en fonction des besoins de l’entreprise, permet de produire les indicateurs voulus.

étape 2 : analyser
Une fois les données centralisées, celles-ci pourront être exploitées à des fins d’analyse. Les analyses pourront porter sur des données de détail (le plus souvent dans un data warehouse hébergé par un SGBDR) ou des données consolidées (le plus souvent dans un datamart sur une base OPAL). Le type d’analyse peut varier : requête multicritère, analyse prédictive à travers un outil de data mining, etc. Les analyses peuvent se faire a posteriori, en temps réél ou a priori.

étape 3 : restituer et publier
à travers des rapports, des tableaux de bord, un portail, une analyse multidimensionnelle, une analyse prédictive ou autre, la publication des données permet de présenter à l’utilisateur de la façon le plus lisible possible les information à valeur ajoutée et ciblées par type d’acteurs.

Source : CXP.