Secteur public : l’Open Source pour réduire la dépendance

Selon Markess, le marché des logiciels et services numériques dans le secteur public en France s’élevait à plus de 8 milliards d’euros en 2021. Après une croissance un peu plus forte entre 2020 et 2021 due au rattrapage des effets de la crise sanitaire, le marché a repris un rythme de croissance tendanciel autour de 2,8 % en moyenne par année d’ici 2025, une croissance inférieure à la croissance du marché français tous secteurs confondus. Si l’engouement pour le cloud ne se dément pas, il en est de même pour l’Open Source. « Le secteur public a une maturité et une compréhension de la valeur de l’Open Source dans les stratégies d’innovation », estime Jean-Christophe Morisseau, directeur général de Red Hat France.

Au début des années 2000, l’Urssaf a fait le choix de l’Open Source par choix stratégique : « Nous sortions de l’ère des mainframes et entrions dans celle d’Internet et des téléprocédures, nous étions à la croisée des chemins, se souvient Jean-Baptiste Courouble, DSI de l’Urssaf Caisse Nationale. Ce fut l’occasion de s’affranchir des systèmes propriétaires : « Nous voulions garder notre indépendance en sortant de la logique propriétaire car il est difficile de sortir du giron d’un éditeur dans le secteur public, d’autant que les équipes IT avaient de l’appétence pour l’Open Source », ajoute-t-il. Aujourd’hui, 90 % du parc de l’Urssaf fonctionne sous Linux. « Nous avons fait la preuve que ce système d’exploitation est viable. »

Même démarche au ministère de l’intérieur : « L’Open Source s’inscrit dans une démarche de transparence, c’est une volonté de l’ensemble des ministères, nous cherchons à établir un bon équilibre entre l’Open Source et les solutions propriétaires », assure Éric Tiquet, sous-directeur de l’innovation et de la transformation numérique au Ministère de l’Intérieur.

Le recours à l’Open Source participe également à une certaine forme de souveraineté. Notamment du fait de ses caractéristiques : « L’interopérabilité, la standardisation et la réversibilité sont les trois principaux mots-clés de l’Open Source », résume Thomas Belarbi, responsable du secteur public chez Red Hat. L’Open Source reste l’une des voies pour s’affranchir de l’emprise des grands éditeurs et de leurs logiques commerciales. C’est ce que soulignait le Cigref dans un rapport publié en 2018 : « L’Open Source est une des alternatives pour desserrer l’étau financier des fournisseurs et pour disposer de marges de manœuvre dans leurs négociations avec les éditeurs de logiciels. Il confère aux entreprises des avantages stratégiques ainsi que des leviers d’action sur leur compétitivité. »

« Nous avons eu du mal à sortir des grands constructeurs et éditeurs, il faut rester maître de son destin, l’Open Source le permet », estime Jean-Baptiste Courouble. Il en de même pour les usages du cloud : « On ne peut pas stocker nos données dans les clouds des hyperscalers, le choix de l’indépendance permet de changer sans que ce soit une catastrophe », précise le DSI de l’Urssaf Caisse nationale. Pour Éric Tiquet, il importe de « garder les options futures ouvertes au maximum et découpler les systèmes. » D’autant que la quasi-totalité des usages peuvent être supportés par des logiques Open Source.